jeudi 11 juin 2015

part 2 - Les 12 travaux de Jaybix



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Quand j’arrive au deuxième étage, deux personnes attendent avant moi assises dans le couloir, et dans le bureau, mon futur interlocuteur semble occupé avec quelqu’un. On attend. Le quelqu’un sort. Il n’appelle personne et se met à téléphoner. Une marocaine arrive. Le gars est toujours au téléphone. 20mn se sont écoulées. Une astuce de la dernière arrivante s’affiche en bas de notre écran : « si vous rentrez pas, il arrêtera jamais de téléphoner, il fait semblant ». Haha, si c’est le cas, c’est énorme. Alors je teste. Je rentre dans le bureau. Il raccroche sans dire au revoir. put**n de branleur.

« Bonjour, je viens faire une déclaration de perte de mon passeport »

Il me répond tout en faisant semblant de fouiller dans une pile de feuilles vierges.

« D’accord, on pourra rien faire aujourd’hui, il faut attendre 48h »

Attends c’est pas mon petit frère tchétchène que j’ai perdu, c’est un livret en papier, il va pas prendre le bus pour rentrer à la maison.

« Moi il me la faut aujourd’hui la déclaration, j’ai mon billet pour un vol demain »
« Il va falloir le décaler » sans me regarder, avec le dédain le plus complet.
« Je ne peux pas décaler, je dois absolument rentrer pour le boulot, j’anime un séminaire demain soir pour mon entreprise »

(Ouais c’est bien d’alterner les mensonges, ça permet de rester spontané.)

« Monsieur, on ne peut rien faire avant 48h, il faut qu’on mène une enquête pour savoir où il est, vous savez tout ce qu’on peut faire avec un passeport ? »
« J’aurais au moins un papier de déclaration de perte ? »
« Non, rien avant les 48h d’investigation de nos enquêteurs. »

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Il m’a vaincu. Les experts à Marrakech ont encore gagné. J’espère que la lumière noire sur un zoom x300 d’une caméra de sécurité permettra de retrouver les empreintes digitales du coupable.

Je souffle un bon coup. On reprend.

« Bon, OK, qu’est ce qu’il faut faire pour lancer la procédure ? »
« Il faut une photocopie de votre passeport »
« J’en ai une sauvegarde sur mon PC portable, ça suffit ? Ou vous pouvez l’imprimer ? »
« Non aucun des deux, il faut que vous reveniez avec un imprimé de votre passeport. En sortant à gauche il y a une boutique qui pourra vous faire ça. SUIVANT.»

Le tilt. Même pas au revoir, je me fais éjecter comme un point noir entre deux ongles crasseux. Je sors de son bureau, je repasse la sécurité, je confirme avec le garde où se trouve la boutique et je m’y rends. J’arrive devant 3 petites boutiques de m**de, qui vendent des bouteilles d’eau, des porte-clés chameau et des cacahuètes périmées. Je demande à la première où je peux faire imprimer une feuille. Il m’indique la troisième boutique. Je suis quand même sceptique. Elle a l’air de faire 4m2 dont 2 sont occupés par une broche de viande tournante et un frigo.

« Bonjour, je viens imprimer une photo de mon passeport »
« Oui pas de problème, donnez moi le passeport »
« Je l’ai pas, j’en ai juste une version sur mon portable »
« Ah ben non on peut pas, on a juste une photocopieuse ici. »

Le mec m’a envoyé dans un put**n DE KEBAB AVEC UNE PHOTOCOPIEUSE.

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« Où est ce que je peux faire imprimer quelque chose autour ? »
« Y a rien d’autre autour d’ici »

Je tente une solution alternative.

« Bon est ce qu’on peut essayer de photocopier l’écran de mon PC ? »

Il parle en arabe à un gros sac affalé dans une chaise.

« Le patron a dit non. »
« On peut même pas essayer ? »
« Le patron il veut pas. »

J’en peux plus d’eux. Je change de plan. Je souhaite à l’autre qui veut me cagouler avec ses 48h de délai de mourir dans un feu allumé par ses propres enfants. Malin comme un singe, je décide de tenter un autre commissariat. Je prends un taxi en lui demandant de me poser dans n’importe quel commissariat sauf celui que j’ai déjà fait.

Je patiente 30mn dans la queue, et un flic vient me voir pour me demander pourquoi je suis là. Je lui explique la situation, et il me répond gentiment qu’il faut que j’aille au commissariat du 1er arrondissement, étant donné que ça s’est passé au Es Saadi qui dépend géographiquement de ce poste de police. C’est probablement la seule personne bien intentionnée que j’aurai rencontrée de la journée. Bon même si il m’a délicatement viré de son poste de police avec un sourire.

Retour à la case départ, je ne touche pas 20.000 dirhams, je suis reparti pour le premier commissariat. Il est déjà 16h, j’ai raté depuis longtemps le rendez vous à l’ambassade et mes espoirs de repartir le lendemain s’amenuisent autant que mes cheveux au fil des 10 dernières années.

Quand j’arrive, miracle, les 9 sri lankais sont retournés coudre des ballons et il y a toujours les deux flics dont le même branleur, deux femmes qui attendent ensemble et une autre qui fait sa déposition. Elle a l’air en sévère état de choc, pleure toutes les larmes de son corps. Je ne comprends pas grand chose à leur discussion en arabe, mais je capte « iPad » « Samsung » et j’en conclus qu’elle a dû se les faire voler dans la rue. Ca dure… ça dure... Après une heure de discussion, elle finit par se lever pour aller s’asseoir dans le couloir, et elle a l’air aussi stable qu’un château de cartes dans un courant d’air. Elle fait 3 pas, et BAM ! Elle tombe dans les pommes et s’étale de tout son long dans le couloir la tête sur l’escalier. Et personne ne bouge ! Je me lève pour aller l’aider, et seule une femme qui attendait devant moi m’aidera à l’allonger correctement par terre pour qu’elle puisse respirer. Le premier flic vient alors me voir pour me demander pourquoi je suis là.

« Je dois faire une déclaration de vol de passeport »
« D’accord, il nous faudra votre numéro d’entrée au Maroc »
« Je le connais pas »
« Alors il faut que vous retourniez chercher la fiche de police que vous avez rempli en arrivant à votre hôtel »

Sérieux ? Combien de papiers différents on va me demander ?

Me voilà reparti pour mon hôtel, je demande au taxi de m’attendre dehors, le temps que je récupère le papier et on retourne illico au commissariat. La femme évanouie est toujours là, et je lui parle un peu pour m’assurer que tout va bien. Elle a l’air complètement shootée au Xanax ou un truc du genre et parle tout bas.

« Il m’a volé 6 millions »
« Qui ça ? »
« Le pickpocket »
« 6 millions de quoi ? »
« 6 millions qui étaient dans mon sac pour payer l’opération de Mustafah »

(j’apprendrai plus tard que les 6 millions sont 60.000 dirhams , soit 6000€)

« Je veux partir, laissez moi partir, je ne sers plus à rien. »
« Mais non, reposez vous un moment ça va aller mieux. »

Pendant ce temps, les deux filles de devant ont fini leur déclaration et c’est à moi de passer. Il est 17h30. L’ambassade ferme à 18h donc j’ai encore une toute petite chance illusoire. Le mec écoute mon histoire et me dit :

« Je ne peux pas prendre votre déposition, ce n’est pas un vol. »
« Qu'est ce que vous n'avez pas compris dans ce que je viens de dire ? »
« Un voleur ne volera jamais que le passeport en laissant l’appareil photo, donc c’est pas un vol, je peux pas prendre votre déposition. »
« Mais enfin, on ne peut pas supposer le comportement d’un voleur, si ? »

A ce stade là de la journée j’ai l’impression d’être dans un « truman Show » et qu’à tout moment, le rideau peut tomber pour mettre fin à cette mascarade. Après avoir insisté lourdement sur le fait que j’avais absolument besoin de cette déposition pour rentrer chez moi, le seul flic avec des principes de tout le Maroc acceptera finalement de prendre ma déposition. Et il me sort un procès verbal en arabe.

« Il me la faudrait en français, s’il vous plait »
« C’est pas possible, signez celle là »
« Vraiment j’insiste, pour les assurances et tout »

Je signe son papier, et il me consulte ensuite pour la traduction de la déclaration.

« Ca va cette phrase ? »

Sur 16 mots, y a 17 fautes d’orthographe, de syntaxe, de grammaire et je me concentre donc sur les plus vitales à la compréhension du document. Il me l’imprime et me dit :

« OK, il faut qu’Abdellah le signe, va le chercher »
« C’est qui Abdellah ? »
« Il a des cheveux gris, il était là tout à l’heure »

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8ème dimension bonjour. Je me plie aux règles du jeu et je me lève pour aller chercher Abdellah. Je fais le tour du commissariat, et il est introuvable. Je reviens pour annoncer la nouvelle à l’inspecteur BenDerrick qui me répond « OK, c’est pas grave, je vais imiter sa signature ». Soit.

Il est 17h48, et je saute dans un taxi pour essayer d’arriver à temps au consulat. Pas de négociation, pas le temps, ton prix sera le mien, fais toi plaisir, ce soir je suis ta bitch.

17h56, je sonne à l’interphone du consulat…

1 commentaire:

Unknown a dit…

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